Après s’être livrée elle-même à cet exercice, Ombres et caresses a souhaité savoir quels sont les dix livres qui ont le plus marqué certains de ses lecteurs. Le choix m’a d’abord semblé très difficile, mais certains titres se sont néanmoins imposés rapidement. En effet, si j’ai, depuis quelques années, de plus en plus l’envie de relire, essentiellement des classiques, je ne relisais auparavant quasiment jamais (trop de livres à découvrir et trop peu de temps!), mis à part quelques rares exceptions, des livres fétiches que je garde toujours auprès de moi et que je relis régulièrement. Ce qui fait que j’ai ainsi réussi à chroniquer pas mal d’entre eux. J’indiquerai donc le lien sur le titre quand ce sera le cas.
Comme Ombres et caresses a dépassé les 10, je me permets de tricher un peu moi aussi. Et, comme je suis naturellement bavarde, je vais l’être encore cette fois, donc accrochez-vous!… Ce billet m’aura d’ailleurs tenu occupée plusieurs jours!
J’ai beaucoup de souvenirs de lecture de l’école primaire, des Clubs des Cinq et des Alice surtout, des oeuvres de la comtesse de Ségur aussi, et de plusieurs albums et romans dont j’ai oublié les titres mais dont j’ai encore les histoires bien en tête, mais les premiers livres qui ont vraiment compté pour moi sont des découvertes de l’époque du collège.
Les trois mousquetaires – Alexandre Dumas
Je suis restée une grande enfant qui aime qu’on lui raconte de belles histoires et qu’on la fasse rêver. Peu d’histoires m’ont fait autant rêver que Les trois mousquetaires et Vingt ans après (je n’aime pas Le vicomte de Bragelonne, trop triste à mon goût). C’est un régal d’action et d’humour dont je ne me lasse pas, un merveilleux voyage dans le temps dont j’ai gardé une fascination pour les épées… et pour Richelieu.
Catherine de Médicis – Jean Orieux
Quelques livres ont une histoire, et c’est le cas de celui-ci. C’était l’été de mes 14 ans. J’avais épuisé plus vite que prévu le stock de livres que j’avais emporté en vacances. J’ai donc eu l’autorisation d’aller acheter un livre à la « librairie » du village où nous résidions. C’est ainsi que, en farfouillant, je suis tombée sur cet énorme pavé, qui venait de paraître. Depuis l’école primaire, il m’était régulièrement arrivé de passer des après-midis à parcourir la partie Noms propres du dictionnaire, m’arrêter sur les noms des rois et des reines, essayer de reconstituer leur généalogie et m’interroger sur ce qu’ils avaient fait. Le nom de Catherine de Médicis faisait évidemment partie de ceux que j’avais croisés, mais j’ignorais tout d’elle, comme de la plupart de ces personnages historiques. En voyant cette biographie, je me suis dit qu’avec au moins je saurais qui elle était.
J’ai ramé pour venir à bout des huit cent et quelques pages du livre! Il m’a tenu occupée jusqu’aux vacances de la Toussaint, pendant lesquelles je l’ai terminé assise par terre dans ma chambre, le dos au radiateur (l’un de mes endroits favoris pour lire pendant ma jeunesse!). J’en suis sortie fascinée par cette femme d’une grande intelligence et d’un optimisme à toute épreuve, partisane de la paix et négociatrice infatigable, qui s’est dévouée à ses fils et à la France. Ce fut mon premier essai historique mais pas le dernier, bien loin de là! Si je n’ai malheureusement presque plus le temps d’en lire aujourd’hui, j’ai, pendant des années, lu tout ce que je pouvais trouver de sérieux sur elle et sur son temps. Et c’est également elle qui m’a donné envie de commencer des études d’histoire, parce que la légende noire qu’on lui a faite, et dont elle n’est malheureusement toujours pas débarrassée, m’horripile et que j’espérais, très naïvement, pouvoir un jour apporter ma petite pierre à l’édifice de sa réhabilitation.
E = mc², mon amour – Patrick Cauvin
La première histoire d’amour qui m’ait émue. Je suis tombée sous le charme de ces deux gamins que je trouvais touchants et drôles et j’étais admirative devant leur imagination et leur détermination. Aujourd’hui je vois ce que ces personnages ont de caricatural, mais j’ai toujours le sourire aux lèvres en relisant leur histoire.
Lettres à Mme Hanska – Honoré de Balzac
Le lycée a été le temps de ma rencontre avec Balzac. A cette époque, France Loisirs a sorti une édition en 28 tomes de la Comédie humaine, que mes parents m’ont achetée, au fur et à mesure de la parution des volumes. Je me suis lancée dans cette entreprise parce que je gardais un bon souvenir de mon premier contact avec lui, l’étude d’Eugénie Grandet en classe de quatrième, et que je voulais me constituer une culture de classiques. Cette fois encore, ce fut le coup de foudre. Comme j’ai une mémoire de poisson rouge et que j’oublie aussitôt ce que je lis, je relis de temps à autre l’un ou l’autre de ses romans et je me suis, au fil des années, efforcée d’acquérir ce qu’il avait écrit d’autre : oeuvres de jeunesse, Contes drôlatiques, pièces de théâtre, articles pour la presse…
Il m’est difficile d’en dégager une oeuvre que j’ai préférée, mais les écrits qui m’ont le plus marquée sont sans doutes ceux-ci, avec lesquels j’ai découvert l’homme derrière l’écrivain, son génie, son énergie et sa puissance de travail formidables, mais aussi des côtés assez enfantins qui le rendent attachant ou qui m’amusent. J’ai d’ailleurs récemment assez bien retrouvé mes impressions dans la BD Vivre avec Balzac de Joris Clerté.
– A la recherche du temps perdu – Marcel Proust
Proust a été l’une des découvertes de mes années fac… Je me revois encore, au fond d’un amphi, lors d’un cours ennuyeux, essayer tant bien que mal d’avancer dans mon livre. Ce qui m’a séduite chez lui, c’est l’écriture, qui rebute malheureusement trop souvent, et que j’ai trouvé merveilleusement belle. J’ai récemment entrepris de relire A la recherche du temps perdu et j’apprécie cette fois plus encore ma lecture, car, si j’apprécie toujours autant son style, je suis maintenant plus sensible à l’humour et à la finesse de l’analyse des choses et de la psychologie des gens. Il est d’ailleurs possible que j’en poste des extraits ici dans le futur, certains personnages s’adonnant à des pratiques sexuelles peu conventionnelles!
– Le pendule de Foucault – Umberto Eco
C’est, de loin, le roman que j’ai préféré chez cet auteur que j’aime beaucoup et dont l’érudition me fascine. Depuis mon adolescence, je dévore régulièrement avec délectation romans et « essais » autour des Templiers et autres mystères historiques du même genre. C’est un de mes péchés mignons, même si je ne crois pas un mot de ce que je lis. Umberto Eco a réussi avec ce roman à ficeler une intrigue jubilatoire et passionnante, utilisant ces thèmes et une multitude d’autres. Alors, évidemment, ma culture est bien insuffisante pour tout comprendre, mais qu’importe? Je n’en ai pas moins dévoré l’histoire. Ma deuxième lecture du roman (oui, pour celui-là aussi, il y en a eu plusieurs) a été suivie d’une visite de Provins. On a eu la chance ce jour-là d’être les seuls à visiter les souterrains et d’être accompagnés d’une guide qui avait, peu de temps auparavant, fait le même parcours avec Umberto Eco, profitant de l’occasion pour lui montrer où il s’était trompé dans son roman! J’en garde un souvenir formidable. Je me suis promis d’attendre pour le relire, afin d’avoir plus d’éléments de compréhension, d’avoir fini de lire la Bible et lu le Coran et la Kabbale. Autant dire que ce n’est pas gagné! Peut-être quand je serai à la retraite?
– Louis XI – Paul Murray Kendall
Encore un personnage historique qui a été pas mal malmené, injustement là encore, par la postérité et que j’aime beaucoup. Il n’était pas très glamour, car peu dépensier pour lui-même et peu fastueux, mais j’apprécie son intelligence et le fait qu’il ait cherché, quand c’était possible, à aggrandir la France par des achats de domaines et par des mariages plutôt que par les guerres.
J’apprécie cette biographie parce qu’elle est accessible. Trop souvent les essais historiques d’auteurs français sont bien arides. Ceux d’auteurs anglo-saxons que j’ai pu lire sont d’un accès beaucoup plus simple et beaucoup plus plaisant, et ils n’en sont pas moins sérieux. J’aimerais que les historiens français prennent modèle sur eux!
– Harry Potter – J.K. Rowling
Parce que je n’avais pas été autant captivée par un livre depuis Les trois mousquetaires ou Le pendule de Foucault! A la base, j’avais acheté le premier tome pour faire un cadeau, et, avant de le donner, j’ai voulu le lire un peu pour voir ce qui causait un tel engouement autour de la série. Un peu dubitative au début, j’ai vite été captivée… au point d’enchaîner les 4 premiers tomes qui étaient déjà sortis… puis de précommander des mois à l’avance les 3 suivants… en anglais, évidemment, pour ne pas perdre un jour!… et de les dévorer dans les heures suivant leur réception, ne faisant quasiment rien d’autre que lire jusqu’à arriver à la dernière page.
La série m’a également incitée à porter un regard différent sur la littérature jeunesse et à m’y intéresser. Même si je suis maintenant à fond dedans grâce à mon fils, il m’arrive de temps à autre de me lancer seule dans des séries pour ados juste pour le plaisir.
Et ça a été, ces derniers mois, un grand plaisir de partager la relecture des premiers tomes de Harry Potter avec mon fils.
– Mémoires – Henri II, duc de Guise
Si je me suis bien calmée depuis une dizaine d’années (mais j’ai découvert récemment des blogs de bibliophiles qui pourraient bien me faire replonger), j’ai, pendant quelques années, écumé les brocantes, salons et, parfois, libraires spécialisés, à la recherche de vieux livres. Ne connaissant rien aux questions de reliure et d’édition, c’est à cause du contenu des livres que je me laissais tenter. Celui-ci s’est imposé de lui-même : je connais bien les Guise qui dirigeaient le parti catholique lors des Guerres de religion, puisque ma chère Catherine de Médicis a eu énormément de fil à retordre avec eux (il semble même probable qu’ils soient responsables d’une bonne partie des crimes qui lui ont été imputés pendant des siècles), mais je ne connaissais pas la génération de leurs petits-enfants, dont fait partie Henri II. Evidemment, j’avais envie de comber cette lacune, et ce livre m’a semblé idéal pour cela. Il s’est avéré qu’il ne racontait en fait que quelques mois de la vie de son auteur, les 5 mois durant lesquels il a pris la tête de l’insurrection napolitaine contre l’occupant espagnol, mais j’ai découvert en lui un personnage digne des héros de romans de cape et d’épée. C’est à cause de ce livre que j’ai choisi, parmi les sujets qui m’ont été proposés lors de mes études d’histoire avortées, de travailler sur la fortune de sa soeur. Et, ce faisant, j’ai encore appris à mieux le connaître, notamment grâce au livre qui contenait la liste de ses créanciers!
Mais, au-delà du contenu, ce livre est aussi important pour moi en tant qu’objet : c’est le premier livre que j’ai acquis qui était antérieur à la révolution française, et si j’en ai par la suite acheté d’autres des XVIIe et XVIIIe siècles, le plus souvent pour une bouchée de pain, je ne peux jamais l’ouvrir et voir sa date de publication sans émotion.
De façon générale, je suis très attachée aux livres en tant qu’objets. Je trouve un plaisir sensuel à les regarder, les sentir, les toucher. Ce qui fait que les liseuses ne m’intéressent pas du tout.
– GTO – Tôru Fujisawa
Ce n’est certainement pas le meilleur manga que j’ai lu… et d’ailleurs, vu le mal que j’ai à venir à bout des autres séries de l’auteur, je me demande quelles seraient mes impressions si je le relisais aujourd’hui. Ce n’est pas le meilleur manga que j’ai lu, disais-je donc, mais c’est le premier, ce qui fait qu’il occupe pour moi une place à part.
Enfant, mes dessins animés préférés étaient japonais (La bataille des planètes, Albator, Goldorak…). Plus tard, je me précipitais au cinéma chaque fois que sortait un film d’animation japonais. Mais je n’avais pas l’idée d’aller creuser plus loin et je n’aurais jamais imaginé, par exemple, qu’Akira puisse être quelque chose de plus qu’un film. Ce n’est qu’avec GTO, le manga et l’anime, il y a seulement une dizaine d’années, que j’ai réalisé qu’il existait tout un univers, qui n’était pas réservé qu’aux enfants et aux adulescents nostalgiques, qui recelait plein de choses intéressantes et qui risquait de beaucoup me plaire. Je dois à GTO d’avoir découvert un monde que, depuis, je ne me lasse pas d’explorer.
Et, pour en revenir, enfin, au thème de ce blog, il faudrait citer aussi :
– Le rapport Hite – Shere Hite
Je l’ai lu à la fin du lycée, dans une période où j’avais à coeur de découvrir les grands classiques du féminisme. J’y ai appris beaucoup sur cet aspect-là, mais je ne m’attendais pas à y trouver beaucoup plus encore, grâce à son côté très pratique. C’est, en effet, grâce à lui que j’ai fait mon éducation sexuelle et que j’ai appris à aller au delà des tâtonnements intuitifs, en matière de masturbation notamment. J’y ai acquis des connaissances théoriques, y ai trouvé des techniques à expérimenter et ai, au final, beaucoup progressé grâcé à ces expérimentations. Voilà bien longtemps que j’ai envie de le relire, mais je n’ai pas encore pris le temps de le refaire.
– Derrière la porte – Alina Reyes
J’ai lu celui-ci un peu plus tard, attirée par le côté « histoire dont vous êtes le héros », qui me rappelait les volumes de fantasy que j’avais dévorés adolescente. Ce « catalogue de fantasmes » m’a appris à mieux connaître ce qui m’attire et ce qui ne m’attire pas. Et j’ai beaucoup aimé l’écriture d’Alina Reyes. Je n’ai lu depuis qu’une autre de ses oeuvres, il faudrait que j’y remédie.
– Ombres et lumière – Parris Quinn
Ces dernières années, mes lectures érotiques ont malheureusement bien plus souvent été des déceptions que des coups de foudre, surtout en matière de BDs. Parmi les quelques lectures que j’ai néanmoins appréciées, il en est une qui se détache incontestablement du lot. Il s’agit du premier tome de cette intégrale, le second (qui comprend les volumes 3 et 4) étant malheureusement moins bon. Je pense que si cette lecture m’a autant parlé et m’a autant inspirée, cela touche en partie à des raisons personnelles, ce qui fait qu’il m’est difficile d’écrire dessus. Néanmoins, alors que dans tant de BDs, le scénario, inexistant ou complètement tiré par les cheveux, me désole, j’ai aimé la simplicité et le réalisme des histoires de D/s racontées dans ce roman graphique, le réalisme et la beauté du dessin, et la lenteur du rythme qui me convient parfaitement. Je l’ai déjà dit et je le redis : ne manquez pas de la découvrir, si ce n’est pas déjà fait!