Lorsque j’ai effectué quelques recherches sur la biographie d’Hervé-René Martin, que je ne connaissais pas du tout, j’ai été surprise d’apprendre qu’il est plus connu en tant qu’essayiste. Il est, en effet, l’auteur de La mondialisation racontée à ceux qui la subissent, en deux volets, ainsi que d’un Eloge de la simplicité, dans lequel il raconte comment il s’est installé dans une maison en terre et en paille qu’il a construite, pour vivre en conformité avec ses idées. Il est cependant également romancier, et s’est donc essayé à la littérature érotique, à travers une tétralogie, publiée de 1997 à 2004, dont L’éveil de Clémence est le premier volume. Cette série a pour objet les débuts de la vie sexuelle d’une jeune fille. Le premier tome rapporte ses premiers émois érotiques.
On peut lire en quatrième de couverture cette petite phrase : « Découvrez le meilleur de la littérature contemporaine », et le fait est que c’est un roman qui a des ambitions. L’écriture se veut raffinée, mais m’a paru parfois un peu pompeuse et j’ai été étonnée d’y trouver des formules comme « j’ai mal à mon pied » ou « Clémence elle fait… ». Il y a de l’humour mais j’ai parfois eu l’impression que le roman virait au vaudeville. Il y a une histoire, qui est une accumulation de clichés et dans laquelle la psychologie des personnages est totalement improbable. Malheureusement, j’ai trouvé que c’est dans les parties qui ne sont pas érotiques qu’il s’en sort le moins mal.
Pour vous donner un aperçu de ce que ça peut donner, voici un bref résumé des premiers chapitres. Au début du roman, la bourgeoise famille de l’héroïne effectue sa sortie bisannuelle au Louvre et, pour s’y rendre, s’encanaille en prenant le métro, en deuxième classe. Clémence, qui a dû laisser sa place assise, sent soudain une main se poser sur ses fesses. Elle ne verra jamais l’inconnu, qui a de gros doigts rugueux et empeste, mais c’est forcément un prolétaire gros, vieux et moche. Le métro est plus bondé le week-end que les jours de grève, c’est bien connu, ce qui fait que personne ne se rend compte que Clémence a les fesses à l’air, hormis sa soeur qui ne la quitte pas du regard, ce qui est d’autant plus fort que Clémence peut lui attraper la nuque en se penchant un peu, ce qui facilite encore l’accès à ses fesses. Car Clémence, en dépit des exhortations qu’elle s’adresse mentalement, ne proteste pas et, au contraire, prend plaisir à l’intrusion de ces doigts inconnus.
Cet épisode donne à Clémence, qui n’a fait jusque-là que flirter avec des garçons qu’elle allumait, l’envie de se déniaiser. Elle choisit pour cela un camarade de sa classe de terminale, bon élève et très fort en philosophie, et donc, fatalement, coincé et totalement inexpérimenté en matière de filles. Clémence l’attire chez elle en prétextant avoir besoin de son aide pour réviser la philo, l’aguiche en se promenant à moitié nue devant lui, avant de finir complètement nue et de se comporter en nymphomane, se rappelant parfois qu’elle risque d’effrayer ce pauvre garçon si romantique en allant trop loin. A la fin d’une longue (à lire, en tout cas!) séance de pelotage, durant laquelle le comportement et les sautes d’humeur de l’héroïne m’ont parus totalement abracadabrants, les parents de Clémence rentrent chez eux au moment où le garçon éjacule. La surprise fait que le jet atterrit sur le visage de Clémence, qui s’en tartine la figure pour faire croire à sa mère qu’elle est en train de se faire un masque, chose tout à fait naturelle pendant qu’on révise avec un camarade. Ca, ça fait quand même partie des quelques passages qui m’ont fait sourire.
Là où j’ai plus de mal, c’est que le garçon est fils d’une mère célibataire avec qui il vit dans une grande promiscuité et à l’égard de laquelle il nourrit des sentiments très forts et assez ambigus (je devrais peut-être me méfier quand mon fils me reproche de me mettre trop rarement en jupe!). Ce garçon a donc des réactions assez étonnantes quand il est avec Clémence et est très attiré par la mère de sa dulcinée, qui est dotée d’une somptueuse toison pubienne soigneusement entretenue par son masseur préféré (ce chapitre là était terrible!).
Après avoir joué à la maîtresse et à la chienne avec sa soeur, qui est fascinée par son aînée (oui, le roman donne un peu dans l’inceste aussi), Clémence est invitée par un ami de ses parents à l’accompagner en croisière. L’ami en question part en croisière nuptiale avec sa cinquième épouse, qui a à peu près l’âge de Clémence, mais la mère de cette dernière trouve ça tout à fait normal et laisse partir sa fille en toute confiance…
Bon, je m’arrête là pour ne pas spoiler plus. Je pense que vous aurez une bonne idée du contenu du roman si j’ajoute que ça se veut beaucoup plus pervers que ça ne l’est en fait et que, alors que je m’attendais à lire des scènes de débauche, je me faisais la réflexion à la fin des chapitres, un peu dépitée, que c’était beaucoup de bruit pour pas grand chose. Ce qu’il y a de plus intéressant, en fait, ce sont les rêves des personnages. c’est une idée que j’ai trouvée pas mal, mais j’aurais bien aimé qu’il développe un peu plus dans la même veine. Je précise enfin que Clémence est toujours vierge à la fin du roman et, au vu des titres des autres volumes, je me demande si elle ne perd pas sa virginité dans le quatrième tome seulement… mais je n’irai pas m’en rendre compte par moi-même, ayant déjà dû me motiver pour venir à bout de celui-ci!
L’éveil de Clémence
Hervé-René Martin
Editions Climats
Collection Le Cercle Poche
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